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L’ex-président tchadien Hissène Habré est mort en détention au Sénégal

L'ancien président du Tchad Hissène Habré est mort du Covid-19, mardi, à l'âge de 79 ans, au Sénégal, où il avait été condamné à la prison à perpétuité pour crimes contre l’humanité, crimes de guerre et actes de torture.

L'ancien président tchadien Hissène Habré, ici habillé de blanc.
L'ancien président tchadien Hissène Habré, ici habillé de blanc. Seyllou, AFP
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Hissène Habré est décédé des suites du Covid-19, mardi 24 août, à 79 ans, a annoncé le consulat du Tchad à l'AFP. L'ancien président de ce pays d'Afrique centrale était emprisonné depuis 2016 au Sénégal, où il avait été condamné à la prison à vie pour crimes contre l'humanité.   

Il a succombé au Covid-19 à l'hôpital principal de Dakar, a indiqué le consulat du Tchad à l'AFP. Il était tombé malade quelques jours auparavant et avait été sorti de la prison du Cap Manuel, dans le centre de Dakar, pour être admis, à la demande de sa famille, dans une clinique privée, selon la même source. Il a été transféré à l'hôpital quand son état s'est dégradé.

"(Hissène) Habré a été remis entre les mains de son Seigneur", a déclaré le ministre de la Justice sénégalais, Malick Sall, sur la chaîne TFM. Selon le ministre, c'est à la clinique qu'il a contracté le Covid-19.

L'actuel numéro un tchadien, Mahamat Idriss Déby, fils d'Idriss Déby Itno, qui renversa Hissène Habré en 1990 pour diriger le pays d'une main de fer pendant 30 ans, a présenté ses "sincères condoléances à sa famille et au peuple tchadien". "À Dieu nous appartenons et à Lui nous retournons", a-t-il dit sur Twitter.

"Combattant du désert"

Avant de prendre le pouvoir par les armes au Tchad en 1982, Hissène Habré s'était illustré comme chef de guerre. "Combattant du désert", "homme des maquis" : les qualificatifs abondent pour exalter ses qualités militaires du temps de sa superbe.

Né en 1942 à Faya-Largeau, dans le nord du pays, il grandit dans le désert du Djourab, au milieu de bergers nomades. Il part étudier en France en 1963, à l'Institut des hautes études d'Outre-mer. Il étudie ensuite le droit à Paris, y fréquente l'Institut d'études politiques et fait son éducation politique en dévorant Frantz Fanon, Ernesto "Che" Guevara, Raymond Aron.

De retour au Tchad en 1971, il rejoint le Front de libération nationale du Tchad, le Frolinat, dont il prend la tête, avant de fonder le conseil des Forces armées du Nord, le Fan. À partir de 1974, il se fait connaître à l'étranger en retenant en otage, durant trois ans, l'ethnologue française Françoise Claustre, obligeant la France à négocier avec la rébellion.

Il deviendra ensuite Premier ministre du président Félix Malloum, avec qui il rompra, puis ministre de la Défense de Goukouni Weddeye, président du Gouvernement d'union nationale créé en 1979. Nationaliste convaincu et farouchement opposé au dirigeant libyen de l'époque Mouammar Kadhafi, qui a les sympathies de Weddeye, il rompt peu après avec son ancien allié, déclenchant une guerre civile à N'Djamena.

Il combat ainsi Goukouni Weddeye, soutenu par Tripoli, pour rentrer victorieusement à N'Djamena en 1982. Son régime, soutenu face à Kadhafi par la France et les États-Unis, durera huit ans.

Condamné pour crimes contre l'humanité

Cette période est marquée par une terrible répression : ses opposants, réels ou supposés, sont arrêtés par la Direction de la documentation et de la sécurité (DDS, police politique), torturés et souvent exécutés.

Une commission d'enquête estimera à plus de 40 000 le nombre de personnes mortes en détention ou exécutées sous son règne, dont 4 000 identifiées nommément.

En décembre 1990, Hissène Habré quitte précipitamment N'Djamena, fuyant l'attaque éclair des rebelles d'Idriss Déby Itno. Il trouve refuge à Dakar, pour un exil qui sera paisible pendant plus de vingt ans. 

Il est finalement arrêté le 30 juin 2013 à Dakar puis inculpé par un tribunal spécial créé en vertu d'un accord entre l'Union africaine et le Sénégal. Son procès, le premier au monde dans lequel un ancien chef d'État est traduit devant une juridiction d'un autre pays pour violations présumées des droits de l'homme, s'ouvre le 20 juillet 2015.

Le 30 mai 2016, il est condamné à la prison à perpétuité pour crimes de guerre, crimes contre l'humanité, tortures et viols.

"C'est un des bourreaux les plus sanguinaires de l'histoire de l'humanité qui vient de disparaître", a réagi auprès de l'AFP l'un des avocats des victimes, William Bourdon.

>> Revoir : REPORTERS. Le récit de la progressive mise au ban du Tchadien Hissène Habré

Mort du Covid-19

Depuis plusieurs mois, sa famille et ses avocats réclamaient cependant un autre régime que celui de la détention en invoquant son âge, sa santé déclinante et le risque de contamination par le Covid-19 en prison. La justice sénégalaise avait consenti en avril 2020 à le laisser sortir pendant 60 jours. Il était alors rentré chez lui à Dakar, sous garde pénitentiaire permanente, selon les autorités sénégalaises. Mais il avait ensuite dû retourner en prison et la justice avait refusé une demande de libération en avril 2021.

Sa mort est de la "responsabilité à part entière des États africains et d'une manière particulière de l'État sénégalais", a déclaré à l'AFP Kelley Chidi Djorkodei, qui s'est présenté comme l'un de ses neveux parmi un certain nombre de Tchadiens venus devant l'hôpital. "L'État sénégalais aurait pu éviter cela, juste en le libérant", a-t-il dit.

Le ministre de la Justice a rejeté ces critiques. "Nous devons tous être fiers de la façon dont nous avons accueilli (Hissène) Habré", a-t-il assuré. "Là où il est il sait que le Sénégal a été à la hauteur de la Téranga", la tradition d'hospitalité, a-t-il dit.

Avec AFP

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