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IRAN

Le pouvoir iranien poussé à l’arrestation du juge Mortazavi, proche d'Ahmadinejad

Resté libre jusqu'alors malgré une condamnation, l’ex-procureur iranien Saïd Mortazavi, acteur de la violente répression post-électorale de 2009, a été arrêté dans le nord de l'Iran, dimanche 22 avril.

Saïd Mortazavi, ancien procureur général de Téhéran dans son bureau, en 2008.
Saïd Mortazavi, ancien procureur général de Téhéran dans son bureau, en 2008. Abolfazle Salmanzadeh, Fars News, AFP
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Fin de partie pour l’ex-procureur général de Téhéran condamné pour la mort d’un opposant, torturé avec d'autres, après les manifestations de 2009 en Iran. La police iranienne a fini par passer les menottes à Saïd Mortazavi, condamné à deux ans de prison ferme, a indiqué l’agence de presse officielle Mizan, dimanche 22 avril.

Le pouvoir judiciaire le disait volatilisé, "introuvable" depuis cinq mois. D’après des propos prêtés au porte-parole de l'Autorité judiciaire, Gholamhossein Mohseni Ejeï, dans la presse iranienne, un mandat avait été émis à l'encontre de Saïd Mortazavi, mais la justice n'avait "pas réussi à lui mettre la main dessus". Pourtant, sa famille et son avocat ont expliqué qu’il attendait tout simplement de pouvoir faire appel, tandis que la presse iranienne ironisait sur cette non-incarcération, malgré une condamnation prononcée à l’encontre de l’ex-magistrat en novembre 2017.

La police iranienne, incapable de retrouver l’ancien juge, a fait elle aussi l’objet de nombreuses plaisanteries de la part d’Iraniens sur les réseaux sociaux.

Des affiches appelant à l'arrestation de l'ex-procureur Mortazavi dans les rues de Téhéran, après sa "mystérieuse" disparition.

Ennemi des réformateurs

Saïd Mortazavi, proche de l’ex-président ultraconservateur Mahmoud Ahmadinejad avait été suspendu de la magistrature à vie en novembre 2014, après le scandale provoqué par la mort de trois manifestants torturés en prison à la suite de l’élection contesté d’Ahmadinejad.

L’accession au pouvoir des modérés à partir de 2014 a joué en faveur de la condamnation, puis de l’arrestation de l’ex-procureur iranien, ennemi juré du camp réformateur. C’est une députée réformatrice, Fateme Saïdi, membre du groupe parlementaire Espoir qui par son insistance, mercredi, a permis de remettre l’affaire au goût du jour.

Elle a mis sous pression le pouvoir judiciaire, en soumettant à la direction de l'Assemblée une demande d'audition du ministre de l'Intérieur, Abdolreza Rahmani Fazli, et de son collègue de la Justice, Alireza Avaei, afin de savoir "si toutes les actions ont été engagées pour arrêter Saïd Mortazavi".

Mécontentement de la population

"L’affaire a fait tellement de bruit que la justice a fini par céder, les conservateurs ont été contraints de lâcher du lest", explique à France 24 Thierry Coville, chercheur à l'Institut de relations internationales et stratégiques (Iris). En Iran, le pouvoir judiciaire qui dépend directement du Guide suprême, est contrôlé par la branche la plus dure du régime.

"Après les protestations de décembre et l’impopularité grandissante du président iranien qui n’est pas parvenu à faire appliquer toutes ses promesses électorales, le climat n’est pas bon", note le spécialiste. "La lenteur de la procédure d’arrestation de Saïd Mortazavi contribue à alimenter un sentiment de mécontentement au sein de la population iranienne. Elle est perçue comme le symptôme d’une justice à deux vitesses, où les proches du pouvoirs sont rarement incarcérés", poursuit-il.

Des crimes impunis

Sur le plan international, l’incarcération de l’ex-procureur, ne manquera pas de plaire aux Occidentaux et d’offrir des gages, à l’heure où l’Iran est dans le collimateur du président américain Donald Trump. Pour cause, Saïd Mortazavi est la cible de sanctions américaines et européennes pour "graves violations des droits de l'Homme". Les États-Unis et l’Union européenne lui reprochent entre autres, l'arrestation "de centaines de militants, de journalistes et d'étudiants [durant les manifestations de 2009]".

En France, l’association Reporters sans Frontières dénonce depuis plus de dix-sept ans "la responsabilité de Saïd Mortazavi dans des crimes commis contre les journalistes et journalistes-citoyens". RSF l’accuse notamment d’être impliqué dans la mort, à la prison d’Evin, de la photo-journaliste irano-canadienne Zahra Kazemi en juillet 2003. Sévèrement battue au cours de sa détention, celle-ci est morte "des suites de ses blessures quelques jours plus tard", explique Reporters sans Frontières. Un crime resté impuni à ce jour par les autorités iraniennes qui n’ont jamais précisé les causes du décès de la journaliste.

Dans ces conditions, l’arrestation de cette figure symbolique de la violente répression qui a suivi l’élection contestée de 2009, marque tout de même une "avancée" vers une meilleure application de la justice en Iran, même si d'autres abus de Mortazavi restent quant à eux impunis.

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